On en parle

« L’inconnu » du lithium d’Echassières :   Louis Renaud

Depuis que le gisement de lithium de Beauvoir (près d’Echassières dans l’Allier) fait la une des médias  (Cliquez sur la photo) et encore plus depuis le lancement de la commission du grand débat, un reportage fait par FR3 en 1979 nous montre une personne « non identifiée et qualifiée de « visionnaire ». Des extraits de cette vidéo sont repris et commentés, des commentaires sont repris et des archives (INA) en parlent (la dernière fois que je l’ai vu c’était dans l’émission 28’ de Arte en mars 2024) mais aucune n’a identifié ce visionnaire inconnu !

Mais de qui s’agit-il ?

Tout simplement du directeur de la division minière du Massif central du BRGM : Monsieur Louis Renaud à qui beaucoup d’entre nous, géologues clermontois, devons d’avoir reçu son enseignement. Nous sommes également plusieurs à l’avoir eu comme directeur de thèse. Il nous est donc pénible de le voir rangé dans la catégorie des « personnes inconnues »

Louis Renaud a été un géologue de la France d’Outre-mer, ancêtre du BRGM, et pour en savoir plus sur cette période, je vous invite à lire ou relire l’excellent document de Georges Rocci sur « l’œuvre des géologues français en AOF ».

Louis Renaud (1921-2003) a cartographié en détail le massif du Tagant et mis en évidence la stratigraphie des différentes formations et notamment la présence de tillite (ancien conglomérat glaciaire) à l’Ordovicien. Il a également étudié en détail les formations précambriennes du Sénégal oriental (1958-1960) avant de rentrer en métropole et faire, comme beaucoup de géologues miniers, des missions à l’étranger (Pakistan) pour finalement prendre la direction de la division minière Massif central du BRGM en 1960. Il ne quittera ce poste qu’au moment de sa retraite en 1985.

C’est la grande période du premier inventaire minier, qu’il dirige avec autorité et enthousiasme dans le Massif Central, et les lancements des travaux sur les Farges (Ussel) pour le plomb argentifère et la barytine, le Bourneix pour l’or, la barytine de Chaillac, la wolframite de Leucamp, la fluorine du Morvan, le gisement de cuivre et zinc de Chessy, et bien d’autres prospects dont Echassières.

 Echassières a dans ce contexte une histoire particulière : au début il s’agit de compléter l’extraction du kaolin et de la cassitérite (SnO2) par la valorisation d’un leuco granite à lépidolite (mica blanc) contenant du lithium. L’objectif affiché par le député communiste de Saint Pourçain (André Lajoinie), est de maintenir une activité industrielle dans la région en produisant du lithium, qui pourra être associé à l’aluminium pour réaliser avec Péchiney dans l’usine d’Issoire un alliage Al-Li solide et léger pour les avions d’Airbus et ainsi devancer l’américain Boeing. Les premiers sondages supervisés par le ministre des Risques de l’époque, Haroun Tazieff, mais surtout sur le terrain par Jean Pierre Carroué permettent d’extraire suffisamment de matière pour réaliser des tests de valorisation et une première préfaisabilité. Las, les résultats économiques sont implacables : « ce n’est pas rentable » même si Louis Renaud tente d’expliquer que ce gisement sera bien exploité un jour… quand le lithium sera utilisé en grande quantité dans les batteries pour automobiles électriques ! L’exploitation d’Echassières retourne donc à ses classiques : production de kaolin et cassitérite en sous-produit.

Heureusement, l’existence du lithium n’est pas tombée dans l’oubli et le projet réapparait maintenant. Vous pouvez d’ailleurs tous donner votre avis sur son intérêt et ses limites en participant à la consultation publique organisée par la commission du grand débat. (CNDP : Commission Nationale du Débat Public) jusqu’en début juillet 2024.

Jack TESTARD

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